top of page
  • Facebook
  • Instagram
  • Pinterest
  • LinkedIn

De la cigarette à la pipe sacrée : mon chemin avec le Tabac

  • Photo du rédacteur: Lorraine
    Lorraine
  • il y a 17 minutes
  • 8 min de lecture

 Dessin d’une pipe sacrée. Elle ne parle pas. Elle souffle. Et dans ce souffle, les prières anciennes renaissent.
Quand la prière prend forme

Mon chemin personnel avec le Tabac

 

Il y a des amours troubles, des liens noués dans la confusion.

Mon histoire avec le tabac a commencé dans l’ombre, celle d’une adolescente en quête de reconnaissance. J’ai allumé mes premières cigarettes comme on allume un feu dans la nuit : pour se réchauffer, pour appartenir, peut-être pour être vue.

Mais je n’avais pas encore compris que je livrais alors mon souffle sacré à une relation profanée, privée de sens et d’esprit.

 

Lorsque j’ai préparé mon premier voyage au Pérou, on m’a tout retiré : le sucre, le sel, l’alcool, le sexe. Tout ce qui distrait, agite, disperse.

Sauf le Tabac.

 

Autour de moi, l’étonnement :

« Pourquoi cette exception ? »

Mais dans la tradition amazonienne, le Tabac n’est pas une échappatoire. Le Tabac est une plante maîtresse, une grande médecine. Pas une dépendance, pas une fumée qui distrait mais un Esprit qui enseigne.

 

Je suis arrivée dans la jungle après vingt-quatre heures de voyage, lessivée, déconcertée, perdue. On m’a tendu un Mapacho, cette cigarette rituelle au goût âcre, noir, dense comme la nuit. J’ai tiré trois bouffées. Puis, sans un mot, je suis allée me coucher.

 

Jamais je n’avais fumé quelque chose d’aussi fort.

C’était comme si l’Esprit même de la forêt avait traversé mon corps.

Un souffle ancien, venu d’ailleurs, qui me murmurait on ne s’amuse pas avec moi.

 

Une plante maîtresse au cœur de la jungle

 

Dans la médecine traditionnelle Shipibo, le Tabac tient une place centrale.

Plante maîtresse, esprit puissant, il est utilisé de multiples façons : fumé, soufflé, inspiré dans le nez sous forme liquide, ingéré pour purifier le corps, ou encore « diété » dans des retraites de silence et d’isolement.

 

J’ai découvert toutes ces formes.

Je me suis laissée approcher par la médecine du Tabac dans ses multiples visages, jusqu’à ressentir un appel profond, viscéral, ancien.

 

Au Pérou, certains guérisseurs, appelés tabaqueros, ne travaillent qu’avec le Tabac.

Des hommes et des femmes qui consacrent leur vie à marcher aux côtés de cet Esprit exigeant.

Ils en connaissent les chants, les souffles, les silences.

Ils portent les prières.

Loin des usages détournés de l’Occident, ils honorent le Tabac comme un allié de lumière, un gardien de la parole juste, un Esprit de sagesse.

 

Leur chemin est semé d’épreuves et d’initiations, car pour accueillir la clarté du Tabac, il faut d’abord rencontrer ses propres zones d’ombre.

Car le Tabac, lorsqu’on s’y relie sans conscience, amplifie ce qui n’est pas guéri.

Ceux qui l’empruntent doivent apprendre à marcher avec l’Esprit du Tabac dans un profond respect, guidés par la prière, l’humilité et la justesse.

 

Sur ce chemin, une vérité s’impose : le Tabac éclaire autant qu’il révèle l’ombre.

Il faut apprendre à reconnaître ses propres ténèbres, à les apprivoiser, pour ne pas glisser du côté obscur de la plante.

 

Le Tabac, entre ombre et lumière

 

On dit, dans la jungle, que le Tabac est une plante qui porte plus d’ombre que de lumière.

C’est pourquoi il est si souvent mal utilisé, dévoyé, vidé de son essence.

Il enseigne la clarté, la présence, la vérité mais il peut aussi nous égarer si l’on s’y relie sans conscience, sans respect, sans cœur.

 

Comme tant d’autres, je suis tombée dans l’addiction.

Et dans ces états-là, le lien se brouille.

Le Tabac n’est plus un guide, mais un brouillard.

L’intention vacille, la prière se perd, l’Esprit s’éloigne.

 

Quand j’ai rencontré un tabaquero, il m’a demandé d’arrêter complètement le Tabac, sous toutes ses formes, même celles utilisées dans un cadre rituel.

L’Esprit de la plante ne pouvait pas m’enseigner tant que mes parts d’ombre se liaient à son côté obscur.

 

Ce fut un sevrage spirituel autant que physique.

Il me fallait me nettoyer, profondément.

Dans le silence, la patience, l’attente, l’amour et la foi, la guérison a commencé.

J’ai dû renoncer à tout lien avec la plante pour espérer, un jour, renouer avec sa lumière.

Pour retrouver ce chemin sacré vers l’Esprit du Tabac.

 

Chaque jour, je priais le Tabac.

Je lui demandais de m’apprendre à marcher avec lui dans une relation juste, équilibrée, sacrée.

 

J’ai planté des graines de Tabac Hopi, de Mapacho péruvien, selon le conseil précieux de Grandmother Medicine Song, pour transformer ma relation avec la plante.

Je les ai vus pousser, comme des enfants du ciel.

Leurs feuilles, leur odeur, leur souffle vert…

Tout était offrande.

Tout devenait prière.

 


Dessin de l’Esprit du Tabac. Il vient des brumes d’un autre monde. Chapeau penché, il marche entre l’ombre et la lumière. l’Esprit du Tabac nous enseigne à regarder en face nos vérités oubliées.
L’Esprit du Tabac

Une prière sans réponse

 

Dans cet espace sacré de prière, de patience et de soin, j’ai continué à cultiver ma relation avec le Tabac.

Et puis, un jour, j’ai senti qu’il était juste de faire la demande d’une Pipe sacrée.

Un pont entre ma voie personnelle et la tradition des peuples amérindiens.

J’ai partagé avec Grandmother Medicine Song ce que je portais depuis longtemps au creux de  mon âme : le sentiment profond que le Tabac m’appelait depuis toujours, et que le moment était venu d’honorer cet appel.

 

Elle m’a écoutée dans un silence aimant.

Puis elle m’a parlé de Thomas, un artisan qui avait façonné la Pipe de Satya, auprès de que j’apprends.

Mais Thomas venait de déménager, me dit-elle, et elle ne savait pas où la vie l’avait emmené.

Malgré cette incertitude, elle me promit de le contacter, et surtout, elle m’assura de sa présence et de son soutien dans cette démarche sacrée.

 

Puis il y eut les semaines.

Puis les mois.

Le silence.

Aucune réponse.

Le vide.

Le calme.

L’impatience mêlée à la confiance.

 

Un jour, elle me dit simplement qu’elle n’arrivait pas à le joindre.

Cette absence de réponse devint alors une autre forme d’enseignement.

Un rappel.

Un appel à la patience, à la foi, à la persévérance.

À continuer de nourrir ma relation avec l’Esprit du Tabac, sans rien attendre.

 

Peut-être, que je n’étais pas encore prête.

Que mon lien avec l’Esprit du Tabac avait encore besoin d’être purifié.

Que quelque chose, en moi, devait se libérer plus profondément.

 

Alors j’ai continué.

Jour après jour, en silence,

j’ai gardé vivante cette flamme fragile.

Je priais, non plus pour recevoir,

mais simplement pour marcher.

Pas à pas, avec humilité, sur ce chemin sacré.

 

Se relier à l’appel de la Pipe sacrée

 

Je ne savais pas quand ni comment la Pipe viendrait à moi mais j’ai compris qu’avant d’être un objet, elle était d’abord une présence, un appel, un chemin de prière.

 

C’est alors que la vie a mis sur ma route Jim Tree, porteur de Pipe sacré et auteur du livre La voie de la Pipe Sacrée. Lors d’un échange, il m’a soufflé ces mots « Appel la Pipe. Concentre-toi sur elle. Visualise-la. Relie-toi à un animal. Marche avec elle en Esprit. »

 

Jusque-là, je portais toute mon attention sur le Tabac. Mais ses paroles ont fait basculer mon regard : ce n’était pas seulement le Tabac qui m’appelait c’était la Pipe elle-même.

Un pont entre les mondes, un souffle sacré, une offrande vivante.

 

Alors j’ai commencé à méditer sur elle, à la sentir, à l’appeler sans mot.

Elle est le cœur du rituel. La Pipe est l’autel, le souffle, le lien.

 

C’est ainsi que, bien avant d’en recevoir une dans la matière, j’ai commencé à tisser un lien invisible avec la Pipe Sacrée. Une relation intime, silencieuse, née dans l’écoute et le respect.

 

La Pipe sacrée, une médecine vivante

 

Dans les traditions autochtones d’Amérique du Nord, la Pipe sacrée, ou chanupa en langue lakota, est bien plus qu’un objet : c’est un être vivant, un instrument de prière, de guérison et de reliance. Elle est offerte par les Esprits, transmise de cœur à cœur. On ne la possède pas, on l’accueille.

 

Elle est composée de deux parties :

Le fourneau, souvent sculpté dans la pierre rouge de Pipestone, incarne la Terre Mère, le féminin, le contenant sacré. La pierre de pipestone, extraite des carrières sacrées dans le Minnesota, est une pierre utilisée depuis des millénaires pour la fabrication des pipes rituelles. Elle est vénérée pour sa connexion profonde avec la Terre et sa capacité à canaliser les prières.

Le tuyau, façonné dans le bois, représente le Ciel, le masculin, le souffle.

 

Quand ces deux éléments s’unissent, une nouvelle conscience s’éveille. Le souffle devient offrande, la fumée devient prière. À travers le Tabac sacré, chaque bouffée devient un pont entre les mondes, un acte d’amour et d’équilibre, offert aux directions, aux ancêtres et au Vivant tout entier.

 

Une médecine du cœur et du lien

 

Dans les cérémonies de la Pipe sacrée, on entre en cercle. On s’assied en silence. On écoute.

La chanupa est allumée dans la prière. Chacun reçoit à son tour ce souffle venu du cœur de la Terre et des étoiles.

 

Elle circule lentement. Elle unit les êtres dans un même chant intérieur. Elle enseigne la présence, la douceur, la responsabilité du verbe.

 

Il ne s’agit pas de consommer le Tabac, mais de prier avec lui.

Chaque bouffée est une offrande, chaque souffle une intention claire : une prière, un merci, un pardon, une gratitude, une bénédiction.

La Pipe nous relie au Créateur, aux peuples visibles et invisibles, aux éléments, aux ancêtres. Elle nous rappelle que nous sommes les enfants du vent, de la terre, de l’eau et du feu.

 


À l’heure où le soleil touche l’horizon, six gardiens du cercle honorent la prière. Le chef tend la pipe sacrée vers la direction du Nord. Dans la fumée qui s’élève, les souffles anciens renaissent et le silence devient chant.
L'offrande sacrée au Nord

Pourquoi la Pipe sacrée est toujours offerte

 

On ne choisit pas de porter la Pipe.

C’est elle qui appelle.

Elle ne s’achète pas. Elle se reçoit comme un don sacré. Elle est confiée à celui ou celle qui a cheminé avec humilité, silence et engagement.

 

Ce don est aussi une responsabilité. Car la chanupa n’est pas un objet de pouvoir, mais un espace de service. Elle vient avec des prières, des rituels, des silences à honorer.

 

Dans mon cas, la Pipe sacrée est venue à moi comme un murmure long, une prière qui attendait sa réponse. Elle a mis du temps à se révéler, à se rendre visible.

Mais les graines que j’ai plantées ont germé. Le Tabac Hopi et le Mapacho péruvien ont poussé ensemble, dans une même terre, nourris du même chant.

Et ce jour viendra où la Pipe naîtra entre mes mains, non par volonté, mais parce que les Esprits l’auront décidé.

 

Honorer le souffle et le mystère

 

La médecine de la Pipe sacrée est une danse invisible entre la Terre et le Créateur. Une invitation à écouter, à prier, à offrir. Elle nous rappelle que chaque souffle peut devenir sacré, si l’on y met la conscience, l’amour et l’intention pure.

 

La chanupa ne cherche pas à convaincre. Elle se laisse approcher lentement, dans la patience et l’humilité. Elle enseigne sans mots. Elle guérit sans bruit.

 

J’ai appris avec elle à ne plus forcer, à attendre, à faire confiance.

J’ai appris que la vraie prière ne demande rien, mais offre tout.

 

La médecine du Tabac et la Pipe sacrée

 

Si je vous partage mon histoire aujourd’hui, c’est parce qu’en Occident, le Tabac est souvent perçu comme un poison, un fléau, un vice. Or, le Tabac n’est pas l’ennemi. Il est un miroir. Il nous montre là où nous en sommes, notre rapport au sacré, à la dépendance, à la vérité.

 

Mais ce n’est pas le Tabac qui est mauvais.

C’est notre regard, notre rapport à lui, qui est malade.

 

Nous avons perdu la capacité de marcher en relation juste avec lui.

Et peut-être, plus largement, nous ne savons plus comment marcher en relation juste avec le monde.

 

Dans le récit de la création Hopi, il est dit que notre rôle d’êtres humains est d’honorer le Créateur. Et pour cela, nous devons rester en lien avec lui, en dansant, en chantant et en priant.

Combien d’entre nous vivent encore ainsi ?

Combien d’entre nous se souviennent de cette alliance sacrée avec la Vie ?

 

Invitation à marcher avec le souffle

 

Et toi, quelle est ta relation avec le tabac ?

T’est-il déjà arrivé de percevoir une plante non comme une substance, mais comme un maître, un guide, un miroir ?

 

Je t’invite à partager ton expérience, ton ressenti, ton chemin, en commentaire ou lors d’un cercle. Car c’est ensemble que nous tissons les prières du monde. C’est ensemble que nous apprenons à marcher à nouveau dans la justesse, le respect et le lien sacré.

 

Pour aller plus loin

 

Tu peux aussi rejoindre notre communauté : un espace de partage, de prière, de reliance au vivant. Je t’invite à venir découvrir les cercles d’enseignement, les soins au tambour et les ateliers que je propose au Studio Yoga With You, inspirés des traditions ancestrales et de ce chemin d’apprentissage pour vivre en harmonie, et marcher d’une manière juste, reliée.

 

Il est encore temps d’apprendre à écouter et de se souvenir que tout ce qui vit peut nous enseigner. 

 

 
 
 

ความคิดเห็น


bottom of page